EADS – Des têtes et des délits
publié le jeudi 4 octobre 2007
Les conclusions de l’enquête de l’Autorité des marchés financiers sur la chute du cours d’EADS l’année dernière ont été révélées hier par le parquet de Paris. Elles sont accablantes pour les dirigeants et actionnaires du groupe d’aéronautique, accusés de délit d’initiés
1.200 initiés ont vendu plus de 10 millions de titres EADS entre mai 2005 et juin 2006, empochant par la même occasion une plus-value d’environ 90 millions d’euros. C’est l’estimation qui ressort du rapport de l’Autorité des marchés financiers (AMF), au terme de l’enquête sur la chute du cours du groupe d’aéronautique et de défense l’année dernière. Le gendarme de la bourse accuse les dirigeants d’avoir vendu les titres avant la chute du titre EADS, en ayant connaissance de la situation de crise de l’entreprise.
L’AMF s’est concentrée sur les hauts dirigeants d’EADS et d’Airbus, ainsi que sur les principaux actionnaires, soit 21 personnes parmi lesquelles Noël Forgeard, alors directeur général, Arnaud Lagardère et Manfred Bischoff, respectivement présidents de Lagardère et de DaimlerChrysler, premiers actionnaires d’EADS. Des responsables de diverses branches et membres du comité exécutif sont aussi impliqués. François Augue, directeur d’EADS Space, aurait par exemple vendu 10.000 titres pour une plus-value de 114.000 euros. Fabrice Brégier, l’actuel directeur général délégué d’Airbus, est également sur la liste.
Motus et bouche cousue
D’après le rapport, au terme d’un conseil d’administration en juin 2005, Hans Peter Ring, le directeur financier d’EADS annonce que les frais de recherche et de développement à entreprendre par rapport aux difficultés rencontrées par Airbus dans la fabrication de l’A380 et de l’A350 vont faire perdre 4 à 5 euros au titre s’ils sont révélés au grand public. Airbus a réussi à gonfler ses exercices 2005 et 2006 de 100 puis 200 millions d’euros, et d’autant le résultat de 2007, en répartissant les surcoûts liés à l’A380 sur les 3 exercices.
Mais en 2006, rien ne va plus. Les retards de livraison du gros porteur se multiplient, une chaîne de montage est arrêtée, et c’est tout le programme de production qui doit être repris. Cette succession de problèmes n’est révélée au grand jour que le 13 juin. Le cours du titre chute immédiatement de 26% à la bourse… Les dirigeants et actionnaires initiés ont déjà eu tout le loisir de vendre leurs titres.
L’Etat ne semble pas tout blanc non plus. Actionnaire à 15%, il a été mis au courant de la catastrophe boursière annoncée en décembre 2005 lorsque EADS a présenté son business plan à Thierry Breton, ministre des Finances à l’époque.
Le management du groupe aurait conseillé à ce dernier, par le biais d’une note, de vendre une partie de ses actions. Christine Lagarde, sa remplaçante, a souligné hier que l’Etat n’avait pas suivi ces recommandations "en raison du caractère stratégique de l’entreprise"… Mais le grand public aurait peut-être apprécié être tenu au courant de la situation. Nicolas MANGIN.
vu sur http://www.armees.com/EADS-Des-tetes-et-des-delits,25445.html